… ou ISLA GRANDE DE TIERRA DEL FUEGO
C’est à partir du Chili, où nous n’avons parcouru qu’une soixantaine de kilomètres, que nous l’abordons.
Celà commence par la vue étendue sur le Détroit de Magellan pourtant bien rétréci, ici à Punta Delgada ( le navigateur portugais l’a découvert en 1520).
La traversée d’environ 20 minutes se fait en bac.
La route en béton, nord sud traverse d’abord des prairies,
puis…SURPRISE…nous arrivons sur un tronçon de 40 kilomètres de piste. Peut-on appeler « route » une multitude de trous alternant avec de la très grosse tôle ondulée ? Tout vibre et s’entrechoque dans l’Iveco, notre glacière frigo se déplaçant à sa guise par terre, tout ce qui est sur les coussins valdinguant à qui mieux mieux…Bruno roule au pas car il est impossible de faire comme à Valdès en roulant à plus de 70 km/ heure pour « survoler » la tôle; et le trajet nous semble interminable et bien pénible. Sans oublier les cars et 4X4 qui foncent , les camions qui trainent… Bien heureux de retrouver la route 3 en Argentine après la douane passée assez rapidement. La Terre de Feu est partagée entre les deux pays.
En Terre de Feu, il n’y a que 2 villes, Rio Grande – côte est – et Ushuaïa, et un petit bourg de campagne Tolhuin. Le nord de l’île est couvert de steppes qui font vraiment penser à la Mongolie avec beaucoup de moutons et des guanacos, bien sûr !
Au sud de Rio Grande, nous sommes stupéfaits de découvrir des arbres sur des collines. C’est si rare plus haut en Patagonie ! Battus par les vents violents, ils sont gris-verts et couverts de longs lichens dégoulinants tandis que les bords de route sont couverts de sortes de marguerites. C’est l’été !
Plus au sud, nous longeons un temps l’immense lac Fagnano
puis traversons par une route superbe des montagnes couvertes de forêts de lenga et guindo appelé aussi coihué de Magellan (faux hêtres à toutes petites feuilles), et des tourbières rosées. C’est au retour entre soleil et nuages, que nous apprécierons encore plus toutes la majesté et l’immensité de ce décor somptueux qui offre une infinie variété de balades pleine nature et grand air.
Ushuaia, qui se dit » ville du bout du monde » nous surprend : hyper touristique et active, où s’arrêtent les paquebots de croisière, et s’ouvrant sur une large baie du canal de Beagle (nom du bateau de Charles Darwin qui est passé là lors de son tour du monde entre 1831 et 1836), Ushuaia est assez étendue, entre sa zone commerciale et industrielle, et sa banlieue colorée à flanc de montagne enneigée.
En effet elle s’adosse au glacier Martial avec un petit remonte siège pour le ski,d’où la vue est étendue et splendide sur le canal de Beagle.
En face, au sud, il y a aussi de hautes montagnes enneigées et découpées, mais c’est le Chili,
le canal faisant office de frontière. Et Puerto Williams est en réalité la ville la plus australe du continent sud américain.
Ville du bout du monde comme nous la présentait Nicolas Hulot ? Non, bien moins que d’autres comme Puerto San Julian , côte est, par exemple. Ushuaia vit et vit bien. Les habitants que nous avons rencontrés disent s’y plaire et bien plus qu’ à Buenos Aires. Le site est très attachant de jour comme de nuit.
Au delà, à l’ouest, le grand parc naturel de Lapataïa est dédié aux amoureux des trecks et de la pleine nature (un peu trop réglementé à notre goût d’ailleurs). Mythique aussi car il indique la fin de la fameuse route 3 qui vient de Buenos Aires soit 3080kms environ. (que nous avons faite).
Le canal de Beagle est vraiment vaste et très long.
On y trouve bien sûr des îlots multiples avec lions de mer et manchots de Magellan. Le parc ouvre sur une autre de ses baies, celle de Lapataïa, et est très fréquenté par les argentins pêcheurs, campeurs ou randonneurs.
Pour nous, aucun regret d’être venus si bas, malgré les kilomètres avalés. C’est fantastique de se dire qu’on se trouve au sud du continent américain, et pourtant, rien de très dépaysant, si ce n’est cette forêt si particulière.
Nous avons rencontré des gens très ouverts et accueillants, heureux d’échanger avec nous, et des paysages reposants et grandioses. C’est vrai que nous avons été gâtés : mer d’huile et très peu de vent, soleil, nuages, et température tempérée…et en plus, on trouve là-bas des araignées de mer géantes, à déguster avec des » bulles » (on ne se refait pas !)
Chance aussi de faire un tour en petit avion pour admirer en fin d’après-midi l’étendue sans fin des montagnes andines enneigées, entrecoupées de belles vallées, de tourbières et de lacs petits ou grands, parfois couvertes de troncs d’arbres morts. Et ce fameux canal nous a époustouflés par sa dimension, sa beauté pure, et émus lorsque nous avons survolé la première estancia Haberton, établie dans ces contrées dites sauvages où les premiers hommes portaient des peaux de guanacos, ou rien du tout !brrrr… Mais Ushuaïa fut une ville de bagnards, prisonniers politiques pour la plupart, et aussi d’explorateurs et d’aventuriers chercheurs d’or ou chasseurs de baleines.
Un peu à regret, nous remontons vers le nord, obliquant à l’ouest en direction de Porvenir (Chili), et là…
nous retrouvons cette affreuse piste, mais…sous la pluie. On sait désormais que le temps change très souvent en Patagonie. Rapidement notre véhicule se couvre d’une bonne couche de boue bien marron, des roues jusqu’au dessus du toit, occultant totalement tout l’arrière. Inutile de fermer le store cette nuit !! Il nous faudra plus d’une heure de karcher pour enlever le plus gros à Punta Arenas…
Nous finissons par rejoindre une petite piste vers Onaisin. « Ah bon c’est où le village ?, cette estancia abandonnée qui a dû être très active ? « …mais oui , et c’est là que Bruno voit qu’un de ses pneus intérieur est dégonflé. On espère qu’il y a tout de même quelqu’un car il y a moulte moutons et chevaux. Mais, si Bruno s’allonge sous l’Iveco pour changer la roue pleine de boue avec un cric qui ne fonctionne pas, en plein vent fort, nous passons la nuit dans ce désert, seuls et pas tout à fait rassurés sur la suite, la ville la plus proche étant à 120 km au moins…de piste !
Et le lendemain…2 pneus à plat !! Bruno regonfle tant bien que mal et nous repartons, croisant sur la piste 2 gauchos, chien et moutons : alors nous n’étions pas tout à fait seuls ? On avait bien vu une petite lueur derrière un carreau cassé dans la » belle » maison avec nos jumelles. Ils vivent là ?
Nous arrivons à un site unique en bordure de la Bahia Inutil (car le fond est si plat que les navires de Magellan n’auraient pu s’approcher de la côte) : le Parque Pinguino Rey , parc privé où 90 manchots Royaux se retrouvent derrière la plage depuis une dizaine d’années.Dès que les petits savent nager, vers avril, ils repartent dans des îles subantarctiques. Impossible de les approcher à moins de 50m. Des barrières en bois nous en séparent et nous protègent du vent qui d’après le jeune garde est faible aujourd’hui. (s’il le dit …!). Nous sommes bien heureux d’avoir nos bonnes jumelles pour pouvoir admirer leurs couleurs somptueuses et délicatement soulignées, ainsi que leurs petits marrons (on dirait des sacs eastpak ). Cela vaut le détour !!!
De retour sur la piste » ondulée « , nous croisons des cyclistes courageux et déterminés. A 40 à l’heure, nous longeons une mer bleue , bordée de galets et de longues algues brunes. Les petites barques des pêcheurs sont échouées sur le rivage jouxtant des cabanes en tôles rouillées : ce sont leurs ports !
Nous longeons quelques estancias rares et solitaires, l’une étant vraiment très structurée pour la commercialisation et l’élevage des moutons.
Nous surprenons des renards gris et dérangeons les paisibles guanacos rois de la Patagonie, paissant tout le long des pistes ou derrières les infinies clôtures qui jalonnent argentine et chili (ce qu’on en a vu).
Enfin, nous voici à Porvenir, petit bourg dont le port a périclité, mais il a un bac pour le continent. Quelques commerces et maisons colorées, mais on se croirait ici au bout du monde. Néanmoins le bac en fait un lieu touristique plein d’hôtels et de restaurants avec un beau fond de baie sur monts enneigés.
Le bac part le soir même et c’est une chance de ne pas attendre. Comme on est en camping- car on a préféré prendre celui de droite..
Cette île a davantage de charme que le reste de la Patagonie que nous avons vue auparavant. Les paysages , paradis des pêcheurs de gros saumons, et des randonneurs entre mer et hautes montagnes, donnent envie d’être explorés à pied, en bateau…ou en avion !!! Certes, nous n’avons pas eu les vents terribles dont certains parlent, mais le temps change vite entre pluie, soleil et nuages.
Petite ronde d’adieu de ces jolis dauphins, avant d’arriver à Punta Arenas sur le continent:
Nous avons vu des oies sauvages en quantité, des cygnes blancs à cou noir, des renards gris et bien sûr, des guanacos ! En voici quelques uns parmi tant d’autres:
Nous avons fait la connaissances d’Argentins charmants comme Roberto, Nathalia et leurs deux enfants
et de camping-caristes européens. Au gré de nos haltes ou visites, nous avons apprécié l’ouverture d’esprit des Argentins vivant en Terre de Feu, leur gentillesse et le sourire de leurs yeux.
Côté Chilien, nous les avons trouvés un peu plus fermés, mais comme me l’a dit Dante, il suffit de faire connaissance pour avoir un sourire. On verra ça un peu plus loin …
Le Chili est en train de finir la route 257 (on se rappelle la fameuse piste !!!), ce qui va désenclaver le sud…pour le plus grand bonheur des futurs camping-caristes.
En route vers le continent: Punta Arenas (Chili).