Cusco est une ville ancienne qui bouge beaucoup et vit à fond la carte du tourisme. Nous en arpentons le centre à maintes reprises.
Les week-end venté d’août, les familles viennent faire voler leur cerf-volant autour du Christo Blanco qui domine la ville. Il a été offert à la ville par des réfugiés européens de la dernière guerre, reconnaissants.
Mais c’est avec Guillaume et Aurélie venus nous rejoindre pour 12 jours, que nous en visitons l’essentiel autour de la » Plaza de Armas « .
Chanceux, ils ont pu trouver une chambre dans l’hacienda jouxtant notre camping face à un pré où paissent lamas et alpagas.
Cusco, » nombril » en quechua, est le centre des quatre grandes provinces de l’Empire inca et en fut donc la capitale.Elle conserve énormément de fondations de cette époque, il y a 500 ans , sur lesquelles les Espagnoles sont venus construire leurs propres édifices. En somme, Cusco est un mélange impressionnant de murs aux énormes pierres lisses parfaitement emboitées, et d’élégantes maisons à colonnades pourvues de balcons en bois sculpté. L’ensemble est à la fois intéressant, harmonieux, aéré,… et très couru par les touristes.
Mais la police veille, et il n’y a pas de problèmes.
On sent que les Péruviens sont très attachés à leurs racines Incas et Pré-Incas : honneur à la Pachamama…et à la coca !
Pourtant de nombreux couvents et églises sont répartis un peu partout. Néanmoins leur côté surchargé d’or, d’argent, de tableaux, de statues habillées de vêtements brodés d’or et de pierreries nous sature un peu. Trop c’est trop, surtout dans l’immense cathédrale.
Les Espagnols ont eu le toupet de construire leurs monuments religieux en lieu et place même des temples incas considérés comme impies, et ont donc beaucoup détruit.
Un musée nous plaît beaucoup, celui des arts pré-colombiens où l’on y trouve de magnifiques poteries, des bijoux en coquillages, en or, en argent… Bref une magnifique vitrine du savoir- faire des tribus Mochica, Chimus, Nazca (entre autres) qui ont précédé les Incas vers 1250 avant JC avant d’être plus tard conquis par eux.
Cette sobriété raffinée est extraordinaire.
Nous déambulons dans les rues animées avec grand intérêt, nous offrant quelques très bons diners au restaurant. Nous n’omettons pas non plus le Musée du Pisco, bar où cet alcool typique du Pérou (région d’Ica, sud Lima), est présenté sous forme de coktails très variés.Le Pisco Sour (Pisco, sucre, citron et blanc d’oeuf) reste à notre avis un des meilleurs.
Voulant bien sûr aller au Machu Picchu, nous partons d’abrd dans la Vallée Sacrée en camping-car. Nous visitons Chinchero (3760m). Première approche de ces sites aux terrasses impeccables et harmonieuses. Nous descendons les 200 marches pour bénéficier d’une vue d’ensemble du site : petit entraînement pour le Machu Picchu.
L’église du 16è construite sur la place inca recèle des trésors…
…gardés par 4 personnes qui s’y relaient chaque nuit en dormant sur la tribune !
Plus loin, nous descendons par une piste jusqu’au village de Maras, dont nous admirons les jolis linteaux de portes.
Les fameuses salines de Maras comptent plus de 3000 bassins alimentés par des petites rigoles d’eau salée. Elles ont été construites à flanc de montagne avant même l’époque Inca. On s’en servait notamment pour le processus de momification des corps. De nos jours, on y rencontre un secteur » fleur de sel « , un autre » sel rose » et un troisième » sel médicinal « . La vue d’ensemble est vraiment surprenante. On voit des hommes y travailler portant de gros sacs de sel sur leur dos et raclant les bassins.
Reprenant la piste nous allons voir 4 observatoires agronomiques très particuliers à Moray. Ce sont des terrasses circulaires épousant parfaitement le relief de la montagne. Au fond, les Incas y faisaient pousser du maïs (pleine chaleur et présence d’eau), à mi pente, des pommes de terre, et en haut, de la quinoa, le tout à titre expérimental. Ils testaient également des variétés d’arbres et de plantes d’Amazonie aujourd’hui disparus pour la plupart.
Très ingénieux !
Nous passons la nuit à Ollantaytambo d’où part le confortable train de 6h pour le Machu Picchu, ce célèbre site redécouvert par l’ Américain H. Bingham en 1911.
Il s’enfonce lentement le long d’un rio dans une vallée profonde dont la végétation devient de plus en plus luxuriante. C’est à Aguas Calientes que nous descendons pour prendre un bus pour lequel il y a bien sûr la queue.
En une demi-heure, ce dernier nous monte au fameux site…envahi de touristes bien évidemment. Le guide réservé par notre agence, ne se présentant pas, nous filons innocemment grimper sur la plus haute montagne, » la Montania « .
Les – parait-il – 2160 marches !!! bien hautes et irrégulières nous épuisent. C’est au bout d’une heure et demi à 3060m, que nous parvenons enfin, rouges et trempés, sur la corniche mirador d’où le Machu Picchu nous apparaît tout petit, perdu au milieu des montagnes avoisinantes.
C’est un véritable exploit pour nos pauvres genoux, mais nous constatons avec fierté que des jeunes de 20 à 30 ans sont encore plus exténués que nous (euh, pas Guillaume et Aurélie). La descente est plus facile heureusement et nous visitons donc, sans guide, l’ensemble des ruines qui couvrent la montagne, avec des terrasses parfaites qui descendent dans la vallée.
Ici devaient habiter environ 1200 personnes au temps de la splendeur du Machu Picchu. Tout était organisé pour vivre en autonomie, avec des canalisations pour récupérer l’eau des pluies et arroser les multiples terrasses cultivées. Et pourtant c ‘est une ville inachevée, peut-être au profit de Choquequirao, qui signifie » berceau de l’or « , une des rares cités à n’avoir jamais été découverte par les envahisseurs. Cette autre cité, dont les accès avaient alors été détruits par les Incas pour la préserver des envahisseurs, ne s’atteint aujourd’hui qu’à pied ou à dos de mule…un futur Machu Picchu dit-on.
Le Machu Picchu se mérite et il faut du temps, même sans guide, pour en faire le tour, d’escalier en escalier et de ruelles en ruelles.
Une seule porte d’enceinte… …et trois places centrales.
Autour, différents temples, un tombeau royal en forme de fer à cheval, une maison dite » de l’Inca « , des petites fontaines, et des maisons pour les activités artisanales et domestiques.
A l’écart, le quartier des agriculteurs.
Les temples et, comme d’habitude, les maisons des notables, étaient particulièrement soignées : grosses pierres poncées, parfaitement jointives, tout à fait conforme au style inca.
Nous sommes émerveillés de découvrir un tel travail de la pierre, et surtout dans des lieux aussi hostiles sujets aux séismes.
Nous parcourons cette ville étonnante, découvrons l’intérieur de ces petites maisons dotées de niches en pierre, et bien sûr son temple du soleil dont les » fenêtres » sont orientées vers les solstices d’été et d’hiver, et la pierre à sacrifice.
Puis, bien fatigués, refaisons une heure de queue pour redescendre en bus à la gare où le train » Vistadom « , dans lequel les employés nous font un ridicule mais amusant défilé de mode, nous ramène à Ollantaytambo.
De là nous gagnons Urubamba en camping-car, suite de la Vallée des Incas.
La Vallée Sacrée est une boucle où les sites incas de plus ou moins grande taille se succèdent. Elle part de Cusco et remonte vers le nord.
Nous visitons Pisac (2800m) avec un guide érudit et intéressant.
Ici, outre toutes les terrasses habituelles, on y découvre une nécropole de 3000 corps enfouis dans une paroi de montagne en position foetale face au lever du soleil. Bien des tombes ont bien sûr été pillées, ce qui explique l’interdiction actuelle de s’en approcher.
Notre guide nous fait sentir des herbes médicinales et en particulier de la » munia « , un mélange d’odeur de thym, d’eucalyptus, de camphre et de menthe, excellente notamment pour soigner les céphalées et les problèmes respiratoires. Elle servait aussi à boucher oreilles, nez et bouches des défunts pendant la momification afin d’éloigner les insectes. Ce site de Pisac était une place forte importante et très étendue tout autour d’une montagne, avec une zone agricole, des entrepôts, un temple du soleil et son calendrier solaire, et des zones d’habitations.
A quelques kilomètres, un petit zoo privé abrite des animaux rescapés d’accidents ou de maltraitance. Guillaume et Aurélie côtoient ainsi de près lamas aux yeux bleus, alpagas, vigognes, condors, pumas, ours à lunettes, ainsi qu’un chat sauvage et un chien péruvien dénué de poils, sans oublier quelques singes et perroquets.
Il y a tant à voir dans les environs de Cusco qu’il faut faire des choix. Nous visitons le grandiose sanctuaire » Sacsayhuaman » qui domine la vieille ville.
Les fortifications en pierre sont gigantesques et construites en zigzags pour contrer les ondes sismiques. Ici tout n’était qu’argent et or, à l’instar des trois tours qui en étaient recouvertes et mesuraient environ 20m de haut.
Certaines pierres dont les formes évoquent des lamas, serpents, condors et « cuyes » étaient aussi plaquées d’or.
Ce lieu de culte devait étinceler en tous sens, et a du éblouir les espagnols. Ils l’ont pillé, fondant le tout en lingots, et finissant même par tuer le dernier Empereur inca après que celui-ci eut payé sa propre rançon en or !
C’est toute la montagne qui recèle un travail de la pierre titanesque, avec des tunnels,des pierres à sacrifices ou des observatoires. Aujourd’hui les habitants y font ..du toboggan.
Bien des zones n’ont pas encore été mises à jour, certaines habitées par des familles qui à vrai dire ne s’en soucient guère. Il faudrait des fonds énormes ( et improbables) pour tout sortir de l’oubli.
Chaque année de grandes reconstitutions y sont organisées, comme celle du culte de la Pachamama à laquelle nous avons assisté, en quechua, dans le quartier San Blas avec force distribution de feuilles de coca.
Notre route nous mène ensuite au sud de Cusco après un pont colonial remarquable…
…où nous empruntons une piste tortueuse qui conduit notre vaillant camping-car à 4800m. Encore quelques centaines de mètres à pied au milieu des alpagas…
…pour atteindre les 5000m et la montagne aux 7 couleurs : EPOUSTOUFLANT !
Au fond, le massif de l’Ausangate (6384m).
C’est magnifique et totalement nouveau pour les enfants qui restent admiratifs.
Tout le secteur pour venir ici est un savant mélange de couleurs à dominante rose et verte : un peu irréel.
Les paysans, souvent pied-nus malgré le froid, retournent les parcelles de terre à la main. On en voit ramasser des crottes d’alpagas qu’ils mettent dans des grands sacs et qu’ils revendront comme engrais.
Les hameaux envahis d’alpagas et de lamas, s’accrochent par-ci par-là au bord du torrent qui rejoint la vallée.
Et lorsque nous croisons un minibus au centimètre près sur la piste, le chauffeur incrédule félicite Bruno d’être monté tout en haut en camping-car. Pourtant ce n’est pas la pire piste pour 4×4 que nous ayons faite, mais pour eux, ce doit être une première.
Nous retrouvons la route sud vers Puno qui grimpe imperceptiblement le long de la ligne de chemin de fer avant de redescendre sur le vaste plateau de Juliaca.
La traversée de cette ville sous la pluie fine impressionne négativement Aurélie et Guillaume, mais même par beau temps, cette agglomération est détestable. Comment une ville peut-elle être dans un tel état de délabrement et même en plein centre la boue gicle jusqu’à nos fenêtres ?
On a hâte d’arriver à la fameuse plage de Chifron où nous avions passé de si bons moments en Juillet.
Les enfant, comme chaque fois depuis leur arrivée, ont la chance d’occuper la dernière chambre libre d’un petit lodge charmant dominant la baie.
Nous, nous nous garons en bordure de plage gardés par deux chiens noirs, dont l’un, une chienne se montre très affectueuse et douce. Aurélie la surnomme » Chifronette « .
L’endroit est toujours aussi idyllique. Cette fois nous sommes seuls :pas d’autre camping-car, et aucun touriste, même Péruviens.
Le patron du lodge, Walter, responsable d’une association de tourisme équitable, nous organise une journée sur une île Uros, réellement flottante et authentique, puis un accueil dans une famille à Llachon, sur la presqu’île, pour le repas typique de midi. Nous y mangeons de la soupe de légumes et de blé, de la trucha accompagnée de riz et de frites, quelques légumes et une gelée chaude de pomme….avant d’admirer la mère en train de tisser dans le jardin.
L’île Uros se nomme Titino et nous nous y rendons tous les 4 en barque à moteur.
Une famille de 6 enfants et adultes y vit. L’un des garçons nous explique la fabrication de l’île et comment ils sont organisés.
Il procède de la même manière que sur les autres îles déjà visitées, mais celle-ci fait » vraiment » partie d’un village divisé en îlots flottants. Les enfants vont à l’école en bateau sur l’île la plus grande. Ils ont tout de même des barques à moteur, des capteurs solaires, et boivent l’eau du lac filtrée. Ils ont évidemment tous leur Iphone. Ils mangent parfois les parties blanches des roseaux » au goût de salade » dit le jeune homme, mais ils vivent bien ici.
Bien sûr le tourisme les aide à vivre.
Le lendemain nous partons sur l’île d’Amantani située en face de notre plage. Elle est assez haute et pelée (vu du rivage).
Environ 10 villages et 8 petits ports sont établis tout autour et ici, pas de voitures. C’est Erika (20 ans), qui nous accueille, toute fière de porter son costume traditionnel. Elle passe son temps à filer la laine.
Les habitants tiennent à conserver leur traditions, tout en améliorant leur qualité de vie. Les maisons sont plutôt bien entretenues, les ruelles propres et les jardins fleuris.
Erika nous conduit au sommet d’une des collines où se trouve le temple carré de la Pachatata (version masculine de la Pachamama).
En face et un peu plus haut, on aperçoit le temple circulaire de la Pachamama.
La vue, immense, s’étend jusqu’en Bolivie.
Une fois par an, en janvier, tous les habitants s’y retrouvent, apportant leurs meilleures offrandes au chaman qui, seul, à le droit de descendre au centre du temple…en échange de quoi, les dieux doivent honorer leurs voeux. S’en suit une grande fête dans la montagne où tous dansent, chantent et mangent, puis font un concours de danses. C’est aussi un bon moyen de maintenir un climat d’harmonie et d’entraide au sein des différents villages.
Les terrasses à perte de vue, entourées de murs de pierres sèches sont cultivés un peu partout. En octobre seront plantées les pommes de terre.
Erika est adorable et très loquace. Elle nous emmène ensuite déjeuner chez ses parents Ruben et Fani qui tiennent une petite auberge. Après le repas de soupe et de quinoa aux légumes, son père et elle nous font essayer leur costume traditionnel, ce qui nous vaut une bonne partie de rire.
A noter que les chemises brodées le sont par les hommes.
Nous profitons d’une journée supplémentaire de cette plage digne de la Méditerranée, Guillaume et sa mère ne pouvant résister au bain.
Chifronette, la chienne noire nous tient compagnie jour et nuit et Aurélie l’aurait bien ramenée en Suisse ! On repart à regrets comme ce fut déjà le cas en Juillet dernier.
Nous retournons à Cusco, profitant encore de la campagne sereine,
puis allons dîner au » Kusikuy » dans un environnement de murs incas d’origine, pour déguster Pisco Sour et » cuy al horno » dont la viande maigre fait penser à du lapin…
…avant, ….
…après…
âmes sensibles s’abstenir !
Guillaume et Aurélie repartent déjà à Lausanne, nous laissant enchantés de ces très agréables vacances partagées.