Lors du mois d’Octobre, nous roulons beaucoup, empruntant souvent des tronçons de route soit en très très mauvais état, soit longs, étroits, sinueux, et parfois vertigineux. Autant dire qu’on ne compte pas en kilomètres, mais en temps passé à circuler.
C’est dire aussi que nos rencontres avec les locaux sont brèves et éphémères.
Certaines sont bien épineuses et spectaculaires.
Néanmoins, chaque jour nous amène son lot de bonheurs insoupçonnés, souvent simples mais inoubliables, et beaucoup de sourires échangés.
Ainsi nous faisons une halte à Cajamarca, dans le jardin-camping de Ricardo, père de 3 filles, bien sympathique et de bon conseil.
La ville n’est pas désagréable, mais même sa tradition de fabrication de fromages (pâte cuite) ne nous retient, pas plus que ses sucreries.
C’est sur la place centrale de Cajamarca que le dernier Inca Atahualpa s’est fait prendre dans un guet-apens tendu par l’Espagnol Pizarro. Celui-ci malgré ses promesses et le versement d’une énorme rançon d’or et d’argent l’a fait exécuter par strangulation
On aurait aimé visiter les environs de ce Pérou de moyenne montagne si différent, si vert et champêtre,…
…avec ses nécropoles précolombiennes, son aqueduc taillé dans la pierre 1500 avant JC, mais la route qui nous attend est si longue et difficile qu’il nous faut partir.
En 2 jours nous nous rapprochons de l’Amazonie nord-Pérou. La chaleur cogne au sein des montagnes arides où poussent des bougainvilliers sauvages, des manguiers, cocotiers, et même cacaoyers.
Cela nous surprend d’autant plus que , passé un col à 3600m, nous voici dans le » Massif Central « , très vert, pluvieux, avec des prairies où paissent des vaches. Pérou incroyable, et si changeant !
Mais aussi quel bonheur d’être enfin dans un Pérou PROPRE aux jolies maisons.
Nous nous arrêtons à Leimabamba, ……où une panne de courant met tout le monde dehors, créant ainsi une sérieuse animation tardive dans le village. Les Péruviens savent faire la fête en toutes occasions, ce qui perturbe parfois nos nuits. Mieux vaut éviter de se garer sur la place de village, ce que nous faisons pourtant pour des questions de sécurité !
Le petit musée joliment fleuri……a été conçu par les habitants du secteur. Il regroupe les découvertes faites sur la culture Chachapoya ( » guerriers des nuages » du sud-est des Andes), ainsi que les objets et momies découverts dans une nécropole abritée sous des rochers inaccessibles, au-dessus du lac » los condores « .
Ce peuple d’agriculteurs, d’artisans, d’artistes et d’herboristes, était relié aux autres régions par de nombreux chemins dont certains existent encore.
Le culte des morts fut sans doute le thème le plus important de leurs activités religieuses. Pour être momifiés, les corps étaient vidés de leurs entrailles, puis une fois secs, les squelettes étaient attachés en position foetale, et placés dans un carcan de planches ou de toile, où un visage stylisé était peint. Les animaux y passaient aussi.
L’ensemble était rangé dans des sortes de maisons adossées à des abris rocheux, très souvent déjà occupés pendant la préhistoire comme en témoignent les peintures rupestres des parois.
Ces morts étaient entourés de céramiques, instruments de musique, colliers, masques en bois, petits sacs tricotés et autres objets de leur quotidien terrestre.
D’autres villages plaçaient leurs morts dans de drôles de sarcophages verticaux peints, de 2,50m de haut, faits de bambous, terre et bois.
De loin, on dirait un peu les statues de l’île de Pâques.
D’autres statuettes nous rappellent quelque chose…hein mon vieux Milou?
C’est sous la pluie, chose assez rare dans ce voyage, que nous nous enfilons dans la vallée encaissée, dont les arbres sont recouverts de broméliacées et d’orchidées violettes.
Notre seule crainte reste le risque d’éboulement de ces montagnes totalement instables. Nous restons vigilant, au cas où…, et sommes impatients d’arriver à la fameuse forteresse de Kuelap, but de cette grosse boucle de plusieurs jours que nous avons entreprise. Pas de chance pour nous, le téléphérique tout neuf qui traverse une vallée pour rejoindre ce site d’altitude (3000m), est en maintenance…les lundis !
Cela nous oblige à faire un long détour par une piste constellée de trous et parfois bien étroite.
Nous mettons plus de trois heures quand le guide du routard n’en annonce qu’une ! Bruno ne sait même plus où faire passer ses pneus, et le pauvre camping-car en voit une fois de plus de toutes les couleurs. C’est très éprouvant, demandant une vigilance constante pour la conduite et mobilisant notre attention à tous les deux (comme d’habitude). Heureusement on n’y croise peu de camions et de 4×4.
Kuelap (500 à 1570 après JC), ville fortifiée Chachapoya, située en haut d’une montagne verdoyante, mesure environ 600m sur 100m et se prolonge par une enceinte non dégagée d’un kilomètre.
Le mur de la citadelle atteint 20m de haut par endroits, et est percée de 3 portes d’entrée étroites, d’où partent de hauts escaliers très raides.
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Les remparts s’achèvent par une tour de guet.
S’il est à regretter que les travaux de restauration soient quasi arrêtés par manque de moyens financiers, il est certains que cette forteresse mériterait d’être aussi bien remise en valeur que l’a été le Machu Picchu. Elle est encore envahie de végétation.
Les maisons en pierres de 5m de diamètre avaient une forme circulaire recouverte d’un toit de roseaux pointu, afin de mieux lutter contre le vent et la pluie. Au nombre de 400 pour la ville basse, elles devaient former un ensemble spectaculaire.
Bâties toutes sur le même modèle, on peut observer un coin surélevé pour la nuit, et à l’opposé, une grosse pierre pour écraser les grains, une sorte de canal en pierres pour garder les » cuyes », et dans le sol, un trou maçonné pour stocker les aliments, qui plus tard servira de tombe après la fin de cette civilisation.
Les maisons des guerriers sont beaucoup plus spartiates et ne disposent pas des aménagements pour la vie quotidienne. On les trouve aux extrémités de la citadelle.
Seules les maisons des élites, en partie haute, bénéficient de décorations symbolisant le serpent…
…ou l’homme (bâton en pierre au centre du losange hi hi…) et la femme ( à côté bien sûr!).
Le temple (il y en avait deux à cette époque), est un monument tout à fait exceptionnel : il mesure 5m de haut et 13,50m de diamètre et il est appelé » tintero « (encrier), sans doute en raison de sa forme, car la base est plus étroite que la partie supérieure, et qu’il contient une structure creuse en son centre accessible exclusivement par le haut et où étaient disposées les offrandes. On y a même retrouvé des ossements humains.
Les Chachapoyas ont été envahis par les Incas parce que leur territoire donnait accès à d’importants produits pour leurs usages rituels (plumes, coton, coca, etc…). Aussi ont-ils fait alliance avec les Espagnols pour se libérer des Incas. Pourtant leur civilisation a fini par disparaître, à la suite d’une politique de déplacement des populations imposée d’abord par les Incas, puis par les Espagnols. Tout compte fait, cette visite commentée par une femme du village qui se dit » guide » nous déçoit un peu en raison de ses faibles explications, et de l’état actuel du site à demi en chantier.
Bien restauré, ce pourrait être fantastique avec en prime la spectaculaire montée en téléphérique ( sauf les lundis, bien sûr !).
Toute la région, aux fleurs si variées, est truffée de villages et mausolées ( « chullpas ») Chachapoyas – installés dans des cavités rocheuses quasi inaccessibles -, mais qui méritent le détour.
Hélas les pistes d’accès sont si mauvaises (aucun Péruvien n’aurait l’idée de combler tous les trous devant chez lui), que, dégoutés, fatigués, nous repartons rapidement vers l’ouest, sans même monter voir les sarcophages de Karajia accrochés à flanc de falaise. On aurait pu prendre un taxi, mais faute d’endroit sécurisé, nous ne voulions pas prendre le risque de retrouver notre véhicule cambriolé, ce qui est arrivé à d’autres.
Une petite halte rapide dans la ville de Chachapoyas (2335m), nous permet tout de même de visiter un intéressant petit musée,…
…de goûter à son animation..
… et d’y faire des rencontres!