Un seul douanier, et nous ses uniques » clients « . Après trois questions – en français -du genre » avez-vous des armes ? », il nous rend nos passeports tamponnés. Aucune fouille,c’est vraiment rapide ; il fait 12°5.
A NOUS L’ALASKA !
C’est le 49è Etat des USA, depuis le 3 Janvier 1959. Il faut dire que cette région a une histoire particulière. En effet, au début du 17è, l’Alaska était encore un mystère pour le reste du monde. Puis vint l’époque de la découverte par des navires russes, espagnols, français et anglais qui s’aventurèrent jusque dans ces lointaines contrées. Mais ce sont les Russes qui restèrent car ils chassaient les » sea otter » ( loutres de mer) pour leur fourrure surnommée » or doux » par les Chinois, qui les achetaient très cher. Les marchands devinrent riches, et bientôt, l’Alaska se retrouva colonie de la couronne impériale russe. Et pendant 126 ans, cette région fut appelée l’Amérique russe jusqu’à son rachat par les américains en 1867. Cette région a d’abord été organisée en District, en 1884, puis a reçu le statut officiel de Territoire en 1912 avant de devenir le 49ème Etat des USA en 1959. Son drapeau, dessiné par un enfant de 13 ans, représente la grande ourse.. ..et l’étoile polaire.
Le réseau routier asphalté que nous empruntons ne dessert qu’une petite partie sud-ouest de cet immense état, sous forme d’un 8 entre Tok, Fairbanks, Anchorage, Glennallen et Delta Junction: les distances sont longues et plusieurs chaînes de hautes montagnes en font tout l’intérêt.
Notre route contourne le massif Wrangell par Tok et Glennallen. Toujours beaucoup de forêts de sapins, mais de beaux point de vue malgré un temps très mitigé.
Ayant gagné une heure au soleil, nous profitons des journées plus longues pour rouler tard. Nous nous approchons peu à peu des glaciers.
Le Matanuska qui descend sur des kilomètres jusque dans la vallée, donne naissance à un torrent grisâtre.
L’Alaska se dévoile dans la majesté de ses montagnes aux pics acérés.
Au passage, certaines montagnes nous rappellent les couleurs d’Argentine.
C’est par une autoroute digne de l’Amérique que nous arrivons enfin à Anchorage, après 3 jours de doute mécanique : allons-nous perdre la roue? Aussi, nous ne trainons pas afin de faire réparer le plus vite possible. Le garage » camions » indiqué par le mécano colombien de Whitehorse accepte de nous prendre. Après démontage ils nous disent qu’en fait, notre roue avant gauche qui bougeait tant avait été mal centrée, malgré un serrage de tous les boulons ! Il leur semble cependant nécessaire de changer les deux roulements avant qui ont du jeu, pièces qu’ils commandent… au Canada. Le mécanicien nous remonte correctement la roue, et après un essai et son accord, nous partons vers le sud pour une semaine, le temps qu’il reçoive nos roulements.
Nous voulions aller jusqu’à Homer, 350 km plus au sud, sur la péninsule extrême pour achever de bout en bout notre périple sur la Panaméricaine. Le rêve prend forme au travers de somptueux paysages, malgré la présence de nuages : la baie de Cook Inlet…,…celle de Turnagain…,
…Portage Creek et son lac.
Derrière cette montagne, Whittier est un port militaire créé de toutes pièces pendant la 2è guerre mondiale.En effet, à la suite de Pearl Harbour, les Japonais ont envahi les îles Aléoutiennes et l’US Army craignait une attaque sur Anchorage. Ils avaient donc cherché un lieu bien caché pour installer une base militaire secrète. Ils choisirent le village de Whittier, situé au fond d’un fjord étroit bordé de glaciers, accessible seulement par la mer, qui était et est toujours réputé pour son temps de …chien. Son épais brouillard descendant jusqu’à l’eau, masque toute activité humaine.
Pour y accéder, les Américains ont creusé un tunnel mixte de plus de 3km que les véhicules partagent à tour de rôle, et à horaires fixes, avec le train. On roule ainsi partiellement sur des rails. La traversée est limitée à 15 minutes, et il ne s’agit pas d’y perdre une roue (!), ou de tomber en panne dans ce long boyau à peine éclairé !
Aujourd’hui, il ne reste de cette base que de piteux bâtiments dans ce petit port, et l’ambiance y est sinistre lorsque nous y arrivons.
Mais pour nous le temps s’améliore un peu.
Et c’est en repérant de pauvres saumons épuisés en train de remonter un torrent depuis une anse de la baie,….
… que nous nous trouvons presque nez à nez avec deux ours noirs : ils ont FAIM. Moment unique que de voir un ours arracher d’un coup de dents le filet entier d’un saumon encore frétillant. Mais il n’hésite pas non plus à goûter les cadavres: » celui-ci ? oh non, tiens, plutôt celui-là « , se dit-il en laissant tomber négligemment un poisson sanguinolent pour un autre déjà mort.
L’autre ours est juste DEVANT l’Iveco au bord du ruisseau, croquant 3 saumons en même temps. La photo prise d’une main tremblante est (hélas) un peu floue…
Bruno se promet de revenir ici au retour d’Homer.
Surprise, le soleil est de retour dès le lendemain de l’autre côté du tunnel où nous avons passé la nuit.
Les petites rivières limpides des environs sont remontées par des saumons d’espèces différentes. Les rouges attirent l’oeil d’emblée.
La route panoramique excellente qui descend sur Homer, est de toute beauté, avec des eaux turquoises.
La rive opposée ouest, bordée de volcans nous enchante.
Les prospecteurs d’or ont trouvé un riche filon dans le canyon Creek en 1895. Cette découverte occasionna un véritable rush dans le secteur de Turnagain, plus d’un an avant le succès de la célèbre région du Klondike (vers Whitehorse dans le Yukon). De grosses pépites auraient été trouvées ici même.
Une importante communauté Russe vivait ici au 19è. Leurs descendants sont restés, perpétuant leurs traditions, certains vivant toujours dans des yourtes, vêtus de leurs costumes d’époque. Voici l’église et le village de Ninilchik.
Bien des petits bourgs, de lieux-dits ou de rivières ont conservé leur nom russe après que les Américains eurent acheté l’Alaska à la Russie.
C’est le petit kiosque de la Chambre de Commerce et son jardin fleuri, qui accueille le visiteur à Homer.
En face, vue sans fin sur le Pacifique, les volcans, et le parc Katmaï.
Comme le cheval qui hâte le trot quand il sent l’écurie, Bruno accélère pour rejoindre le bout du bout.
C’est sur la langue de terre, le » Spit » qui s’enfonce dans la baie Kachemak, que prend fin la Panaméricaine, fil conducteur de notre voyage, de l’extrême sud à l’extrême nord du continent américain.
Il s’agit d’un simple rond-point, bien laid, bordé d’immeubles.
» Nous l’avons fait, mon vieux Milou ! « .
Champagne Veuve Cliquot !!!
Le site est aéré, entouré de glaciers, et d’une nature plus accueillante peut-être qu’à Ushuaïa. Nous nous sentons bien à Homer.
Environ 1200 habitants vivent dans l’agglomération, dont 40%, des différents métiers de la mer, 20%, du tourisme, et les autres du tertiaire.
C’est surtout ce fameux » Spit » qui concentre hôtels, restaurants, campings et petites échoppes touristiques. De nombreux tours sont proposés pour survoler les glaciers, aller voir les ours du parc Katmaï au sud, ou aller pêcher au gros.
Son port de plaisance est plein et fait le lien avec les îles de l’extrémité ouest de l’Alaska.
Le halibut (ou flétan du Pacifique) fait la réputation de la ville, un poisson dont la forme évoque le carrelet, mais qui peut mesurer plus de 2m et peser plus de 200kg. Sa chaire raffinée se rapproche du cabillaud.
Comme un cadeau, le soleil se met de la partie pour que l’on puisse admirer cet environnement.
Les gens vivent bien ici, malgré un froid intense en hiver (-40° à -50°).
Nous profitons du temps très agréable, et partons en hydravion faire un survol des glaciers situés de l’autre côté de la baie. Nous apercevons même de loin des ours noirs sur les rochers.
Wess, le pilote est vraiment sympathique et nous propose de rester garés devant son chalet-bureau pour la nuit. Sa charmante femme Angela, ajoute que nous pouvons même nous y installer , et aussi utiliser sa voiture ! Nous apprécions énormément cette marque de confiance.
Homer : fin d’un long rêve , qui se termine en beauté.
Nous sommes heureux et fiers d’avoir pu rallier les deux extrémités du continent américain comme nous avions imaginé en 2016 de le faire.
Et maintenant il ne nous reste plus qu’à rentrer…
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